ITW d’Alex et Maud Lauriot-Prévost, accompagnateurs de couples se préparant au mariage.
Vivre ensemble ou se fiancer ?
Aujourd’hui, 95 % des couples qui se préparent au mariage vivent déjà ensemble depuis plusieurs années, certains ont déjà des enfants. La célébration du sacrement de mariage, vient comme deuxième, troisième ou quatrième engagement. Les fiançailles pour eux, cela n’a pas beaucoup de sens, parce qu’aujourd’hui quand on s’aime on couche ensemble très vite et on vit ensemble encore plus vite. Leur dire qu’il y a un temps d’abstinence et de distance à vivre avant, cela ne rentre même pas dans les possibilités pour eux, ce n’est même pas envisagé. Je ne parle pas des couples chrétiens qui ont quand même une idée des fiançailles sans en comprendre tout le temps le sens.
Le sens des fiançailles
Dans les fiançailles, il y a du bon sens, simple : quand on construit un couple, il faut passer du « je » au « nous », ça prend du temps, il faut se positionner. Si on est tout le temps l’un sur l’autre, on ne peut pas discerner et avoir du recul, et ça oblige à un dialogue en profondeur, à des questions, au courage de la vérité, etc… Il y a des jeunes qui nous disent : avec cette fille, je n’ai pas envie de coucher parce qu’avec elle on discute beaucoup, si on couche on ne discutera plus. Il y a l’idée que cela appauvrirait le dialogue, ce qui est curieux parce que la relation sexuelle vient normalement en aboutissement d’une communion de couple. C’est donc bien qu’il y a inversion dans la relation puisque ce qui devrait être l’aboutissement dans le cadre d’un engagement mutuel est ajourd’hui un préalable.
Au niveau spirituel, c’est beaucoup plus profond. Il y a dans la sexualité du couple un enjeu tout à fait autre qui est de célébrer un amour consacré par Dieu dans le sacrement : on se reçoit de Dieu, on ne se prend pas et on ne se donne pas sexuellement tant qu’on n’est pas dans une parole qui engage. Sinon, la relation sexuelle ne peut pas aller au bout de sa signification parce que « peut-être demain tu me quitteras ». Ce n’est pas du tout le sens profond de la relation sexuelle qui est le don total à l’autre après une parole dite, et qui ouvre sur la fécondité.
Des richesses pour toujours
Il nous est arrivé d’accompagner des couples qui vivaient ensemble, qui n’arrivaient pas à se décider au mariage et qui ont pris conscience que le fait de vivre ensemble ne leur permettait pas de poser un choix libre. A partir de cela ils ont fait un chemin pour se rendre compte qu’un engagement libre exigeait une certaine distance, que le fait de vivre tout le temps ensemble ne facilitait pas la décision de l’engagement. Souvent on se rend compte qu’ils sont entraînés dans une vie conjugale sans s’être posé la question : « Est-ce que c’est simplement parce qu’on s’aime qu’on se met ensemble ? » ou « Est-ce qu’il y a un projet plus important ? ». Le débat n’est pas simple entre eux.
Pour un garçon et une fille, dans le contexte actuel, être chaste et continent c’est un vrai combat. C’est un combat sensuel. Ce combat a un sens et le fait de pouvoir le mener construit la fidélité pour la vie entière. On plante des racines en profondeur pour la vie de couple. L’engagement dans le mariage est une décision : quoiqu’il arrive, je me suis engagé à t’aimer, j’ai décidé de t’aimer. Aussi surprenant que cela puisse paraitre, aimer c’est bien plus qu’être amoureux, c’est aussi prendre l’engagement de demeurer ensemble et d’affronter ensemble les difficultés pour goûter le plus grand bonheur qui est d’aimer en profondeur. Aimer ce n’est pas simplement avoir plaisir à être ensemble, c’est tout mettre en oeuvre pour le bonheur de l’autre, et donc pour le sien. Et cela ne se décide pas à la légère, il faut du temps, du discernement puis cette part de confiance qui fait que l’on dit oui à ce projet fou.
Pour les jeunes chrétiens, ce temps de fiançailles est comme un “noviciat conjugal” : de même que ceux qui se réparent au célibat consacré éprouvent leur vocation avant de s’engager, ainsi les fiancés prennent le temps du discernement avant leur mariage.
C’est aussi une responsabilité des chrétiens que de témoigner de ce qu’ils vivent pendant cette période de fiançailles et de la beauté que c’est pour eux. Pas de chercher à convaincre mais d’interpeller et de donner envie. Les fiançailles, ce n’est pas un moment facile mais c’est le moment où l’on pose les fondations de sa maison et il faut creuser bien profond pour être sûr que la maison tienne.
Propos recueillis par Claire AVALLE – Pour PARIS NOTRE DAME et le site Internet du diocèse de Paris
- Fiançailles Chrétiennes, Noviciat Conjugal (format PDF – 34.4 ko)